Avec la sortie récente du film Jupiter Ascending, notre billet d’aujourd’hui portera sur des recherches consacré à l’œuvre la plus connue des Wachowski : The Matrix. Ce film, sorti en 1999, a rapporté plus de 464 milliards de dollars au box-office mondial (Source) et, selon plusieurs chercheurs, a changé l’industrie du cinéma hollywoodien.
Ce film a également eu une influence sur ses fans. En 2003, le sociologue Razmig Keucheyan a effectué une enquête auprès des communautés de fans de The Matrix sur Internet. L’un de ses buts visés était de vérifier si le discours philosophique présent dans le film s’est rendu jusqu’aux fans.
L’intérêt des fans pour la philosophie véhiculée par Matrix est sans nul doute sincère. Le film renferme d’authentiques problèmes philosophiques – comme en témoigne l’attention que lui portent nombre de philosophes professionnels – et ils consacrent souvent de longues heures à en comprendre les termes. Mais la philosophie constitue également une ressource normative pour les fans. Indépendamment de son contenu, elle est mise à contribution par ces derniers pour tracer une ligne de partage entre deux attitudes à l’égard de Matrix. La première, connotée négativement, est « hollywoodienne », et caractérise de l’avis des fans la majorité des spectateurs du film. La seconde, connotée positivement, est « philosophique », et désigne les personnes sensibles aux problèmes de fond soulevés par Matrix. (Keucheyan, 2006, p. 52)
Alors que Keucheyan étudiait les fans, Jennifer M. Proffitt, Djung Yune Tchoi et Matthew P. McAllister ont plutôt choisi d’étudier la stratégie de marchandisation autour de la trilogie. L’avancée technologique, telle que l’arrivée des DVD sur le marché, peut expliquer cette diversification de produits dérivés.
As discussed, the most distinctive feature of promoting all commercial intertexts of The Matrix, such as two sequels of The Matrix, its DVD format, and the video game Enter the Matrix, is an emphasis on constructing the Matrix as a global textual event that attempts to move its fans via multiple revenue streams through the promise of an enriched story. (Proffitt , Tchoi et McAllister, 2007, p. 251)
Plus près de nous, Marc Joly-Corcoran a analysé le premier film dans le cadre de sa maîtrise en études cinématographiques. À cette fin, il a utilisé la grille éladienne du sacré ainsi que les notions de sémio-pragmatique proposées par Roger Odin, mêlant ainsi les sciences des religions et les études cinématographiques en ce qui concerne la réception du spectateur.
[…] le film des frères Wachowski inspira un nombre incalculable de blogs, de sites de fans et de livres, qui ont tous répondu à l’appel du jeu herméneutique auquel le film les conviait. The Matrix marque un moment important dans l’histoire du cinéma, particulièrement à la fin du siècle dernier, en cela qu’il constitue, à mon avis, un jalon incontournable pour quiconque s’intéresse à la réception spectatorielle du cinéma populaire et son appropriation subséquente par le spectateur désireux de perpétuer sa relation affective, avec le film. (Joly-Corcoran, 2007, p. 13-14)
Bien entendu, on ne peut passer sous silence la contribution d’Henry Jenkins. En 2006, il consacra un chapitre à The Matrix dans son livre Convergence Culture: Where Old and New Media Collide. Pour avoir une idée de cette contribution, je vous invite à lire cette critique tirée de l’International Journal of Communication.