[Cet article a été publié originellement le 29 août 2015 sur Syndromemag.]
En mai dernier, la Digital Games Research Association (DiGRA) présentait un congrès à l’université Leuphana à Lüneburg (Allemagne). Le thème? Diversity of play : games – cultures – identities. C’est durant ce congrès que deux chercheurs ont présenté leur recherche réunissant deux éléments qui semblent à première vue incompatibles : Animal Crossing : New Leaf et l’horreur.
À propos des auteurs
Ashley ML Brown est détentrice d’un doctorat en sociologie et est maître de conférences en conception de jeux numériques à l’université Brunel (Royaume-Uni). En plus d’être secrétaire pour la DiGRA, elle est également un des membres fondateurs de la branche britannique de cet organisme. Il est possible de consulter la liste de ses présentations et de ses publications sur son site Internet.
Björn Berg Marklund est présentement au doctorat à l’université de Skövde (Suède). Dans le cadre de sa maîtrise en informatique, il a complété un projet sur la collaboration entre pairs et l’apprentissage dans des environnements orientés vers les utilisateurs. Plus récemment, lors de sa licence, il s’est consacré à l’étude des obstacles lors du développement et de l’utilisation de jeux éducatifs.
À propos du sujet
Animal Crossing : New Leaf (AC:NL) est un jeu de simulation sur Nintendo 3DS sorti au Japon en 2012 et en Amérique du Nord et en Europe l’année suivante. Le joueur est le maire d’une ville habitée par des animaux anthropomorphes. Le but du jeu n’est pas explicite, mais le joueur est invité à cultiver ses relations avec les résidents, à décorer son chez-soi, mais aussi la ville, le tout dans une ambiance bon enfant.
À propos de la recherche
Pour leur recherche, Brown et Berg Marklund ont analysé les interactions entre le joueur et les personnages non-joueurs (NPCs) d’AC:NL selon trois thèmes utilisés dans la littérature scientifique concernant les jeux d’horreur : la perte d’agentivité, l’inquiétante étrangeté freudienne et l’étrangeté heideggérienne.
Pour commencer, la perte d’agentivité dans AC:NL peut être ressentie en ayant une gamme limitée d’actions, notamment lors des dialogues avec les NPCs. Par exemple, lorsque les résidents de la ville sont tristes ou en colères, il est impossible d’interagir avec eux, même si le joueur n’est pas la cause de leur état actuel. Dans le cas de l’inquiétante étrangeté freudienne, qui évoque un monde similaire au nôtre, mais légèrement différent, on peut remarquer que les NPCs ou le joueur peuvent consommer du café ou des fruits, même si la faim semble inexistante dans le jeu. Enfin, selon le concept de l’étrangeté heideggérienne, les résidents de la ville paraissent « vivants » en ayant une parfaite mémoire des actions du joueur, par exemple en révélant le temps exact qui s’est écoulé depuis leur dernière conversation avec le joueur.
En conclusion, les auteurs rappellent que leur analyse ne doit pas être trop prise au sérieux, sachant qu’AC:NL est avant tout conçu pour les enfants, qui ne vont pas être perturbés par des éléments tels que la perte d’agentivité. Néanmoins, cette étude permet de se rendre compte des thèmes habituellement associés à l’horreur dans des jeux non effrayants.
Pour en savoir plus sur cette étude, vous pouvez la consulter à l’adresse suivante : http://www.digra.org/wp-content/uploads/digital-library/160_BrownMarklund_Animal-Crossing.pdf