Après le succès de M42 – Magie et Sorcellerie, les équipes de Bordeaux Geekfest et d’Angers Geekfest ont décidé de poursuivre leur aventure avec la parution d’un deuxième tome de M42, cette fois-ci ayant pour thème les femmes, fictives ou réelles.
Une fois de plus, j’ai décidé de participer à leur campagne de financement participatif, campagne qui a remporté un vif succès. Voici ce que nous réserve ce nouveau volet…
À propos du livre M42 – La Culture geek au féminin
M42 – La Culture geek au féminin est le deuxième volume du projet M42, servant entre autres à garder une trace physique des festivals Bordeaux Geekfest et Angers Geekfest.
Après la magie et la sorcellerie, M42 souhaite « rendre hommage aux grands noms féminins de la pop culture, faire découvrir des pionnières, éveiller des vocations ». Cet hommage se retrouve à travers 6 dossiers thématiques.
Jeunesse
Pour ce premier dossier, on commence avec une analyse d’Alexandra Ramos sur les personnages féminins dans l’univers de Batman. Par la suite, Bénédicte Coudière se penche sur le sexisme dans la littérature jeunesse. Même s’il y a plusieurs œuvres qui font place à plus de diversité dans la littérature jeunesse (Le prince et la couturière, Le garçon sorcière), celles-ci font malheureusement partie de la minorité. Il existe même des collections de livres regorgeant de stéréotypes de genre :
« P’tite fille et P’tit garçon, chez Fleurus à partir de 2008 où les filles ne pouvaient être que des fées, jouer à la poupée, à la dinette ou à la princesse, quand les garçons conduisent des camions, des tracteurs, vont à la ferme. On remarque d’ailleurs qu’autant la collection fille ne contient qu’une dizaine d’ouvrages, autant celle des garçons est très vaste et de nouveaux albums paraissent encore aujourd’hui. » (Coudière, p. 24)
Littérature
Côté littérature, Julien Capoulun et Alexandre Trujillo de MDCU Comics retracent l’histoire des femmes dans les comics. Puis, Andres Camps analyse la présence des femmes (personnages ou mangakas) dans l’univers des mangas. Enfin, Tolkiendil, une association consacrée à l’œuvre de J.R.R. Tolkien dans la francophonie, présente un article de Dimitri Maillard sur les femmes de la Terre du Milieu, mais aussi sur leur invisibilité dans l’histoire :
« La guerre n’est pas cependant pas la seule cause de cette invisibilité. Même en temps de paix, les femmes ne sortent que peu de leur foyer, comme en témoignent les dires d’Aragorn à Arwen lors de leur première rencontre. L’exemple de cette dernière est instructif : au cours du Seigneur des Anneaux, elle reste à Imladris pour ne surgir qu’une fois la guerre finie, à l’occasion de son propre mariage. Elle aura pendant ce temps tissé l’étendard du Gondor, à la façon d’une Pénélope attendant le retour d’Ulysse. » (Maillard, p. 53)
Histoire et matrimoine
Dans cette section consacrée à l’histoire, nous commençons avec la guide conférencière Marie Lambert, qui présente le côté sombre des écoles de préservation de jeunes filles, institutions pénitentiaires françaises qui ont fini par fermer leurs portes au milieu du XXe siècle. Ensuite, Soline Anthore-Baptiste et Nicolas Baptiste (de la chaîne YouTube Les Geekstoriens) s’intéressent aux représentations des femmes guerrières dans l’histoire. De son côté, la youtubeuse Sarah ‘n’ yo fait le tour des différentes représentations du mythe de la Dame Blanche alors que Franck Dunas (de la chaîne YouTube Mathador) présente quelques femmes scientifiques qui ont changé le cours de l’histoire. Finalement, Gaël Barreau et Yon Ortiz de Urbina effectuent un tour d’horizon de femmes scientifiques dans la vie réelle et dans la culture populaire :
« Le personnage de Jodie Foster dans Contact est une astrophysicienne qui parvient à convaincre la NASA de construire un prototype de machine pour contacter des extra-terrestres, tâche dont s’acquitte Amy Adams en tant qu’experte linguiste dans The Arrival de Denis Villeneuve. Le même réalisateur prendra l’initiative de transformer le personnage de Liet Kynes, planétologiste d’Arrakis, en une femme dans son adaptation de Dune. » (Barreau et Ortiz de Urbina, p. 103)
Les faiseuses de la pop culture
Ce dossier-ci effectue la rencontre avec quatre femmes impliquées dans différents milieux de la culture pop. Tout d’abord, Brigitte Lecordier, doubleuse à qui l’on doit la voix française de Son Goku enfant. Ensuite, Elise Madranges, pratiquante du jeu de rôle grandeur nature. Puis, Caelys, illustratrice de Riot Games à qui l’on doit la couverture de ce livre. Et enfin, Jehanne Rousseau, fondatrice du studio de développement Spiders, qui raconte son parcours dans le monde du jeu vidéo :
« Quand j’ai commencé chez RFX, on ne parlait pas de crunch, pourtant nous étions en crunch perpétuel, nous finissions trop souvent nos journées à 2 ou 3h du matin, l’équipe était très très jeune et se moquait même d’être payée, puisque nous avions la chance de travailler dans le jeu vidéo… Aujourd’hui heureusement, les choses ont changé. Le public a mûri mais les développeurs aussi, et ce qui s’est passé chez RFX créerait un véritable scandale aujourd’hui. » (p. 137)
Femmes à l’écran
Avant de s’attarder aux personnages féminins ayant marqué le cinéma, Alexis De-Angelis présente quelques tests interrogeant la place des femmes dans le scénario, comme le test de Bechdel. Par la suite, Nathalie Zema effectue le portrait d’Ellen Ripley, l’héroïne de la saga Alien. En conclusion de ce dossier, l’équipe de Rien à regarder effectue un retour sur les Black Christmas, autant sur la version originale de 1974 que sur les remakes de 2006 et 2019 :
« Un élément de ce Black Christmas version 2006 mérite cependant d’être relevé pour l’importance qu’il aura a posteriori. Dans ce remake, le père de la première victime, qui lançait l’intrigue du premier volet, est remplacé par sa sœur. Alors que, comme nous le relevions, le père est une figure très critique du fonctionnement de la sororité, le personnage de la sœur se présente pour ses membres comme une figure de soutien, prenant une part centrale dans le combat contre les tueurs, liées par une expérience commune. Le film ébauche par là une cohésion féminine dans le dépassement des difficultés, thème qui deviendra central dans la dernière reprise de la licence, réalisée en 2019 par Sophia Takal. » (p. 166)
Jeux vidéo
Dans ce dernier dossier thématique, nous avons d’abord droit à une présentation de Stream’Her, une communauté d’entraide et de mise en avant des femmes dans le streaming, suivie d’entrevues avec trois streameuses : Oniriie, Karo Vesper et Telliam. Ensuite, Women in Games France, une association visant la mixité dans l’industrie du jeu vidéo en France, résume l’évolution du jeu vidéo et de la place accordée aux femmes au cours des dernières décennies. Thomas Olivri explique par la suite les origines de son blog, Geek-Art, qui met en valeur des artistes internationaux inspirés par les univers de la culture pop. Enfin, pour compléter le tout, nous retrouvons cinq illustrations expliquées par leurs illustratrices respectives (Mélissa Houpert, Weird Undead, Irina Kuzmina, Lente Scura et Aleksandra Skiba). Interviewée par l’équipe de M-42, Mélissa Houpert donne ce conseil à ceux voulant se lancer dans une carrière artistique :
« Je crois que prendre le temps d’apprécier le chemin donne plus de valeurs à ce que nous vivons. C’est comme faire une randonnée en ne pensant qu’au moment où on aura atteint la fin. Est-ce que c’est vraiment ce qui lui donnera de l’importance? Alors que les personnes que nous rencontrerons, les victoires que nous vivons pendant la randonnée sont au final bien plus importantes que son terminus à mon sens. […] Le but final peut varier au fur et à mesure de notre apprentissage, apprentissage qui continue tout au long de notre carrière artistique, nous sommes juste tous à des points différents et c’est ça qui est exaltant. » (p. 201)
En conclusion
Tout comme son prédécesseur, M42 – La Culture geek au féminin est un livre haut en couleur, avec de belles illustrations. On y retrouve d’anciens collaborateurs du premier tome (comme les Geekstoriens et Marie Lambert), mais aussi de nouvelles personnalités (comme les streameuses Oniriie, Karo Vesper et Telliam), ce qui ajoute de la fraîcheur au contenu.
Toutefois, je dois admettre que j’ai eu quelques difficultés à déterminer l’ordre de lecture de certains passages (je pense entre autres à la page 35). J’ose espérer que ce problème sera réglé lors de la production du tome 3 de M42.
Néanmoins, on apprend beaucoup de choses en lisant ce livre. Si vous voulez en savoir plus sur l’influence des femmes sur la culture populaire, je vous le recommande, ne serait-ce que pour leur contribution à la science.
Pour vous procurer l’un des tomes de M42, rendez-vous à la page suivante : https://www.billetweb.fr/m42-magie-sorcellerie