« Get a life » ou le mépris des fans

Alors que le nouveau film de la franchise Star Wars, The Force Awakens, est projeté dans les salles de cinéma, je suis tombée récemment sur un lien partagé par un membre du groupe Facebook « Geek Québec ». Le lien en question? Un article de Sophie Durocher intitulé « Vous n’êtes pas tanné de Star Wars, bande de fans? ».

Curieuse par le titre, mais aussi par les réactions des membres du groupe, j’ai fini par lire cet article. Dès le premier paragraphe, l’auteure de l’article parle de « fe-fans ». Ça commence bien…

Par la suite, elle donne plusieurs exemples d’objets dérivés pour démontrer la stratégie de marketing déployée autour de Star Wars. En termes d’excès, je crois que ce n’est pas la première fois, comme le démontre Marc-André Lussier. Par exemple, lors de la sortie de Revenge of the Sith, nous pouvons apercevoir une publicité pour Diet Pepsi mettant en vedette nul autre que… Yoda.

Un peu plus loin dans l’article, l’auteure semble exaspérée par les débats entre fans, allant même leur adresser un « Get a life ». C’est cette expression, popularisée par William Shatner dans un sketch de Saturday Night Live, qui a probablement encouragé le membre du groupe à partager cet article.

[youtube https://www.youtube.com/watch?v=ZaB_G1WNT70&w=420&h=315]

Ce que je trouve désolant, c’est qu’il existe toujours des personnes méprisant les autres pour ce qu’ils aiment. D’autant plus que le stéréotype du fan a souvent été représenté de façon négative au cours des dernières décennies. En 1992, Henry Jenkins a publié Textual Poachers : Television Fans and Participatory Culture, une œuvre marquante pour ceux qui s’intéressent aux fan studies. Dans son premier chapitre, il donne plusieurs exemples de cette représentation négative du fan :

As these examples suggest, the fan still constitutes a scandalous category in contemporary culture, one alternately the target of ridicule and anxiety, of dread and desire. Whether viewed as a religious fanatic, a psychopathic killer, a neurotic fantasist or a lust-crazed groupie, the fan remains a « fanatic » or false worshiper, whose interests are fundamentally alien to the realm of « normal » cultural experience and whose mentality is dangerously out of touch with reality. (Jenkins, 1992, p. 15-16)

Vingt ans plus tard, son livre a été réédité et une conversation entre lui et Suzanne Scott a été ajoutée à cette nouvelle version. Parmi les sujets abordés, il explique comment les médias continuent à avoir les mêmes conceptions du fan :

So, in The 40 Year Old Virgin, a key step into heterosexual normality comes when the protagonist sells his action figure collection; we can see Virgin as a prototype for a whole cycle of comedies which celebrate « arrested development » as a masculine virtue/privilege, but the more manly the characters are, the more likely their interests are in sports or rock, rather than in science fiction and comics. Fan boys have been, by and large, better served by literary representations by authors such as Nick Hornby (1996), Michael Chabon (2000), Jonathem Letham (2004), or Junot Diaz (2008), than in media depictions. (Jenkins, 2013, p. xv)

Heureusement, cette perception du fan a commencé à changer, surtout dans le milieu journalistique :

The exception may be in nonfiction. More and more journalists are themselves fans and thus openly display fan expertise and engagement. Commercial blogs, such as io9, Blastr, and the Los Angeles Times’ Hero Complex, take fans seriously as a demographic, and San Diego Comic-Con gets cover stories in Entertainment Weekly, which often assume a fan rather than « mundane » reader. (Jenkins, 2013, p. xvi)

Suite à ces lectures, je me suis demandée de quelle façon les médias québécois décrivent les fans. En regardant les articles et vidéos du marathon Star Wars ayant eu lieu au cinéma Banque Scotia de Montréal, je crois que nous pouvons avoir espoir.

Des fans surexcités et satisfaits du dernier Star Wars (Journal de Montréal)
L’engouement pour Star Wars à Montréal (TVA Nouvelles)
The Force Awakens: Superfans out in force for 16-hour Star Wars marathon (Montreal Gazette)
Star Wars FANdemonium (Global News)

Et vous, que pensez-vous de la médiatisation autour de Star Wars? Ou du traitement des médias envers les fans?