Depuis déjà deux ans, nous vous avons présenté une foule de conventions variées provenant d’un peu partout au Québec. Exceptionnellement, nous voulons mettre de l’avant ceux derrière le succès de ces conventions : les visiteurs. Ils sont en effet nombreux. Les plus grosses conventions accueillent des dizaines de milliers de personnes et les plus petites, au moins quelques centaines. C’est pourquoi nous vous présentons ce mois-ci la première partie d’un compte rendu de témoignages qui nous ont été donnés généreusement par quelques personnes habituées des conventions. Nous leur avons posé une série de questions pour savoir ce qu’elles pensent des conventions et quelles sont leurs habitudes lorsqu’elles fréquentent de tels événements.
Les rencontres ont eu lieu au début de notre projet, soit en 2017, donc les informations et les témoignages sont tels qu’ils étaient à ce moment et pourraient être différents si on leur posait les mêmes questions aujourd’hui. Néanmoins, ce sont des témoignages bien intéressants qui reflètent sans doute les habitudes de plusieurs personnes. Notre but est de donner la parole à quelques participants pour en savoir un peu plus sur les « con-goers » pour mieux les présenter en tant qu’individus. Dans cette première partie, nous allons nous intéresser à leurs habitudes lors des visites dans des conventions.
Portrait des participants
Nous avons rencontré sept personnes : Kelly, Steph, Vanessa, Matthew, Christopher, Esther et Anna*. L’âge des participants va de 22 à 33 ans. Ils résident dans les régions de Montréal, de Lanaudière, des Laurentides et de la Montérégie. Les participants vont surtout dans des conventions montréalaises, soit l’Otakuthon et le Comiccon de Montréal. Il y a aussi quelques visites au G-Anime de Gatineau et au Nadeshicon de Québec qui sont évoquées. Ils assistent surtout à de grosses conventions plus généralistes portant sur l’animation japonaise, les jeux vidéo ou les comics. Ils ont une expérience plus ou moins longue avec ces événements. Vanessa et Kelly sont celles qui ont le plus d’expérience avec leur première convention en 2009. Anna était, quant à elle, assez nouvelle dans cet univers en 2017 avec une première présence en 2014. Pour les autres participants, les dates des premières conventions s’échelonnent de 2010 à 2013. Cinq d’entre eux font du cosplay occasionnellement ou régulièrement.
Les habitudes de convention
Les participants que nous avons rencontrés sont uniquement des visiteurs et ne font pas partie des marchands, des artistes ou des animateurs de panels. Ils ne participent pas non plus aux concours de costume (mascarade). Ils visitent donc les conventions pour en profiter et peuvent être considérés comme des consommateurs de conventions. C’est une activité qui se fait entre amis, en couple, en famille ou bien seul avec parfois des rencontres amicales au cours de l’événement. Bien qu’il y ait de nombreux points communs dans leurs habitudes, notamment en ce qui concerne les activités, il est intéressant de voir des visites uniques à chacun.
Les préparatifs
Les préparatifs font partie prenante d’une visite à une convention. C’est un gros événement qui nécessite parfois une planification commençant des mois à l’avance. Pour nos participants, les préparatifs dépendent surtout du lieu de résidence. En effet, pour ceux habitant à l’extérieur de Montréal, il y a un lieu d’hébergement à prévoir ainsi que les billets, puisque c’est moins dispendieux de les acheter en prévente. Tous les préparatifs d’un séjour d’un week-end sont donc de mise avec, entre autres, les bagages et les dépenses à prévoir.
Steph : « J’ai une liste Otakuthon que je coche au fur et à mesure que les items entrent dans la valise. »
La plupart du temps, Anna et Christopher ne passent qu’une journée à l’événement et achètent leur billet sur place. La seule préparation est alors le billet de métro, de l’argent pour les dépenses et un endroit pour manger.
Ceux qui font du cosplay ont aussi plus de planifications à faire, non seulement pour terminer le costume à temps, mais aussi pour le transporter si c’est nécessaire. Pour la nourriture, il est intéressant de noter qu’à peu près tout le monde compte sur les restaurants à proximité du lieu de la convention pour les repas. Les conventions mentionnées se déroulent au centre-ville de Montréal, près du quartier chinois ou dans un bâtiment comprenant une foire alimentaire, ce qui facilite le choix de restaurant.
Esther : « Il y a des restaurants tout près, alors j’y dîne souvent pour amener le moins de choses sur moi, à part mon costume ».
Les dépenses
La participation à une convention demande souvent d’importantes dépenses. Le billet peut coûter jusqu’à une soixantaine de dollars selon l’événement. Notons toutefois qu’il existe une très grande variation à ce sujet entre les conventions; certaines ne coûtent que quelques dollars. Une des activités les plus populaires étant l’achat d’objets de toutes sortes qui sont difficilement accessibles autrement, cela constitue souvent une grande partie des dépenses. En ce qui concerne les personnes interrogées, le montant général dépensé se situe entre 60 $ et 500 $. Cela inclut le séjour à l’hôtel lorsqu’il y en un, ce qui fait augmenter considérablement la facture. Les autres dépenses se trouvent dans le prix d’entrée, les achats sur place et les repas.
Pour certains, cela peut même varier d’une année à l’autre selon le nombre et le type d’articles achetés. Christopher, par exemple, n’y va habituellement qu’une journée et achète très rarement des articles. Ses dépenses se situent donc entre 50 $ et 60 $, ce qui comprend le billet d’entrée et un repas. Pour Anna, il s’agit d’une sortie en famille la plupart du temps avec son conjoint et leur fille aînée; alors, même s’ils ne restent qu’une journée, ils dépensent « au moins 200 $. Les billets sont chers et les articles aussi. »
Kelly : « Je reste en chambre d’hôtel avec mes sœurs pendant la fin de semaine, du jeudi au dimanche. Nous mangeons presque tous nos repas au Chinatown ou au Tim Hortons. C’est notre grosse fin de semaine de dépenses! […] En moyenne, sans calculer le prix de l’hôtel, je crois que je dépense environ 200 $ pour la fin de semaine. Manger au Chinatown ne coûte pas cher et je n’achète pas trop de choses. »
La visite à une convention n’est donc pas nécessairement une très grande dépense selon le type de visiteur qui la fait. Or, cela peut aussi varier très rapidement selon le genre de visite qu’on veut faire.
Les activités
La plupart des conventions offrent le même type d’activités : salle des marchands, salle des artisans, ateliers et conférences sur différents sujets, séances d’autographes avec des célébrités, concerts, concours de cosplay pour ne nommer que quelques exemples. Toutes les conventions offrent aussi des activités plus spécifiques à leur créneau ou leur centre d’intérêt.
En général, les participants interrogés font le même genre d’activités. Ils aiment tous se promener et admirer les cosplays des autres visiteurs. Les salles des marchands et des artisans sont aussi très populaires et c’est là où ils passent une bonne partie de leur visite, même s’ils n’achètent pas toujours beaucoup de choses. Cependant, chacun a ses propres intérêts et certains ont des choix spécifiques parmi la manne d’activités offerte. On y retrouve par exemple la projection du Dr. Horrible’s Sing-Along Blog, le concert de l’Orchestre de jeux vidéo et autres spectacles de musique, le Cosplay RPG Battle et les panels et conférences sur toutes sortes de sujets.
Steph est la seule qui a mentionné avoir déjà assisté à la mascarade dans les années précédentes, chose qu’elle ne fait plus cependant. Elle passe dorénavant plus de temps au DollFest, une activité pour les adeptes de ball-jointed dolls, des poupées articulées personnalisables.
Les activités centrées sur la culture japonaise comme on peut en retrouver au Nadeshicon ou à l’Otakuthon ont aussi été nommées. On y retrouve par exemple un concert de tambours taiko et un atelier d’ikebana, un art floral japonais. Kelly résume bien, de son côté, la raison pour laquelle la mascarade n’est pas très populaire : « Je ne veux pas attendre en ligne pendant des heures pour avoir une bonne place. »
Les achats
Les objets qu’on retrouve lors des conventions sont d’une très grande variété. Souvent, les participants ont un type d’objet préféré qu’ils recherchent alors que d’autres en profitent pour faire des découvertes. Tout d’abord, notons que Christopher et Anna sont les plus modestes au niveau des achats avec quelques articles au total dans toutes leurs visites, en majorité des t-shirts. Pour les autres, en revanche, les items sont très variés. On retrouve des peluches, des bijoux, des épinglettes, des verres gravés, des macarons, des signets, des breloques pour téléphone, des films, des jeux vidéo, des impressions d’œuvres d’art, des mangas, des accessoires pour le cosplay et des objets particuliers d’un fandom.
Vanessa : « [J’achète] peut-être trop! À chaque année, j’essaye d’être raisonnable, mais c’est difficile quand il y a tellement de petits bibelots mignons! »
Matthew : « C’est une des raisons pour laquelle je vais à des conventions. Je cherche toujours des replicas d’objets que l’on trouve dans des jeux vidéo, comme des armes ou autres. »
La salle marchande est l’endroit où on retrouve souvent la marchandise officielle ou des entreprises un peu plus importantes. Quant à la salle des artisans, elle présente des artistes dans plusieurs domaines, mais surtout en dessin, qui vendent leurs œuvres. La plupart du temps, il s’agit d’impression et non d’originaux, ce qui rend l’objet plus abordable. C’est alors l’occasion de rencontrer des artistes, de discuter avec eux et d’acquérir des œuvres uniques en référence à un fandom.
Kelly, par exemple, achète parfois des commissions des artistes, c’est-à-dire des œuvres faites sur demande. Esther aime particulièrement les rencontres avec les artistes. Elle raconte : « en 2014, j’ai acheté un calendrier génial qui représentait les superhéros de Marvel dans des positions sexy, comme c’est le cas généralement dans la représentation des femmes. Et le calendrier représentant des femmes les présentait dans une position de pouvoir, sans sexualisation. C’était fabuleux de pouvoir partager avec l’artiste et échanger sur le sujet. »
Les célébrités et les invités
Dans les activités offertes par les conventions, on retrouve très souvent la rencontre avec des vedettes de cinéma, de télévision ou d’Internet. Ce n’est pas, par contre, une activité très convoitée par les personnes que nous avons rencontrées. Pour certains d’entre eux, ce n’est pas ce qui les attire pendant la convention. Pour d’autres, c’est le coût de ces rencontres qui les font hésiter. En effet, il faut parfois payer un montant pour avoir un autographe ou une photo d’une vedette invitée, surtout si elle vient du cinéma ou de la télévision. Nous avons quand même reçu quelques témoignages de rencontres. Christopher se souvient de sa rencontre en 2016 avec Robin Lord Taylor de la série Gotham : « J’ai pu découvrir un homme très simple et sympathique envers ses fans ».
Vanessa a trouvé sa rencontre avec Doug Walker (Nostalgia Critic) marquante, car elle l’a fait changer d’avis sur cette personnalité d’Internet. « C’est intéressant, car avant de le voir en personne, je n’étais pas intéressée à sa série. Je croyais qu’il était trop intense après avoir vu une de ses vidéos. Par contre, le voir en personne, jaser avec lui et regarder son Q&A avec ses fans m’a ouvert les yeux, et j’ai réalisé que, comme tout le monde qui fait du divertissement, ce n’est pas la même personne en personne que dans l’écran! J’ai même réessayé son show, et j’ai bien apprécié. »
Fan d’animes, Kelly a rencontré surtout des doubleurs de ces séries qui ont tous été, selon elle, très sympathiques. Il est intéressant de voir que la chose que les participants retiennent le plus lorsqu’ils rencontrent une personnalité connue, c’est comment elle agit dans la « vraie vie » et comment elle est avec les fans qu’elle rencontre.
Il existe autant de visiteurs que d’expériences et les témoignages de sept personnes ne donnent qu’un minuscule aperçu de ce que les gens font concrètement dans une convention. Or, c’est intéressant de voir que ces sept personnes ont toutes quelque chose de différent à nous raconter par rapport à leur expérience. Chacun participe à l’événement à sa manière et il est facile de comprendre que chacune des conventions dont nous avons parlé offre une variété semblable chez leurs visiteurs.
(À suivre…)
*Certains prénoms ont été modifiés à la demande des participants.
Pour en savoir plus sur le projet GeekQCon
- GeekQCon – Introduction aux conventions
- GeekQCon – Geekulture Lanaudière (2017-)
- GeekQCon – SagGeek (2016-)
- GeekQCon – Otakuthon (2006-)
- GeekQCon – Animara Con (2014-)
- GeekQCon – Comiccon de Québec (2014-)
- GeekQCon – GeekFest (2010-2018)
- GeekQCon – Con*Cept (1989-2011)
- GeekQCon – G-Anime (2009-)
- GeekQCon – Shawicon (2016-)
- GeekQCon – Nadeshicon (2011-)
- GeekQCon – Geek Café (2017-)
- GeekQCon – Congrès Boréal (1979-)
- GeekQCon – FantastiCon Montréal (2015-)
- GeekQCon – Comiccon de Montréal (2008-)
- GeekQCon – Anticipation (2009)
- GeekQCon – Mangabitibi (2012-2013) et AnimAT (2014-2015)
- GeekQCon – Scintillation (2018-)
- GeekQCon – Anthrofest (2006-2007) et What the Fur? (2010-2017)
- GeekQCon – Festival Draconis (2006-2009 et 2017-)
- GeekQCon – Star Trek Creation Convention (1991-1995)
- GeekQCon – RubikCon (2018-)
- GeekQCon – Geek-it! (2019-)
- GeekQCon – Cruise Trek : The French Connection (2006)